[Blowers] eat it up

Date : jeudi 8 juin 2023

On ne peut pas dire que ce soit la grande foule sur les coups de 20h à l'International en ce jeudi soir, on suppose que les spectateurs attendent que les températures baissent un peu pour sortir, mais ce n'est que moyennement cool pour les musiciens qui doivent entamer la soirée vers 20h00...

On n'a encore jamais eu l'occasion de croiser la route de Crash Test, le quatuor classique qui débute son set devant moins de 10 spectateurs, dont la moitié sont les autres musiciens qui joueront plus tard... Heureusement, après un premier titre bien énergique, le public descend et permet de se sentir moins seul dans la salle, et il est vrai qu'il aurait été dommage de ne pas faire l'effort, car l'accidental rock'n'roll/garage garbage/wild trash qui nous est présenté mérite une oreille à la fois attentive et bienveillante. Le trio guitare/basse/batterie, s'il n'est pas toujours totalement carré et même parfois un poil approximatif, compense largement ces défauts par une énergie et une envie qui font plaisir à voir et entendre, et permet au chanteur habité, dont l'allure évoquera Rick James aux plus anciens, de se déchaîner sans crainte d'être abandonné par ses comparses. Musicalement, ce qui est annoncé ne semble pas très clair, mais quand on est placé devant la scène on sent que Johnny Thunders et ses Heartbreakers sont une grosse influence, au-delà des reprises de one track mind et de chinese rocks (la paternité du morceau est quand même partagée avec Dee Dee Ramone) voire de pills puisque le titre de Bo Diddley était un classique des concerts de Thunders, et figurait déjà sur le premier album des New York Dolls... Et des titres tels que fuck you fuck me too ou enjoy destroy semblent suffisamment débiles pour être jouissifs ! Si on tient à pinailler, on peut estimer que la reverb' dans la voix est un peu trop omniprésente, et qu'il ne faut pas forcément abuser de l'harmonica, mais c'est juste histoire de dire, cela ne gâche rien, on se prend une quarantaine de minutes de rock qui fonctionne bien, intégralement dans mes critères de sélection, alors au bout du set on se dit qu'on retournera voir le groupe avec plaisir à la prochaine occasion !

On est un peu moins surpris lorsque les quatre Süpersports arrivent sur scène, puisqu'on avait vu le groupe l'an passé au QG Oberkampf, dans les conditions acoustiques que l'on connaît, mais ce soir le trio guitare-basse-batterie, s'il ne s'est pas totalement coordonné au niveau vestimentaire (le guitariste ayant oublié son maillot vert pour être à l’unisson de ses comparses, il se retrouve donc torse poil), montre qu'il est très au point et jamais hésitant, ce qui lui permet de varier les styles à l'occasion, même si globalement on est dans un punk à tendance hardcore dont le chant féminin évoque toujours Beki Bondage avec cette voix toujours quasi cassée qui oblige à crier, dans un beau micro vintage apparemment adapté à la situation. Étonnamment, j'entends de temps à autres des influences un peu psycho, pas désagréables au demeurant, mais au fil des minutes l'aspect hardcore (pas bourrin) est de plus en plus évident, avec une basse très en avant, ce qui n'est pas non plus pour me déplaire. Certains estimeront que 45 minutes, c'est dix minutes de trop, cela peut s'entendre, mais on ne boudera pas le plaisir qu'on a pu ressentir tout au long du set, exempt du moindre solo ou de la moindre afféterie, bref la soirée se poursuit sans la moindre anicroche !

Et pour terminer, ce sont les Australiens de Blowers, déjà vus la semaine dernière en première partie des Chats au Trabendo, qui vont s'appuyer sur une setlist proche de celle déjà entendue, mais augmentée puisque le quatuor va avoir droit à un bon quart d'heure supplémentaire. Alors, si on va retrouver les happy birthday, hate that shit ou wipe my ass, un bel hommage va être rendu à leurs compatriotes des Saints, avec une reprise bien énergique de demolition girl, et ce qui apparaissait comme un excellent concert de garage punk au Trabendo se transforme ce soir en une véritable démonstration, le groupe prouvant qu'il se sent finalement bien plus à l'aise quand il est au contact direct du public, surtout quand celui-ci est déchaîné. Ainsi, certains s'empareront ici du micro, là grimperont sur scène pour arborer un t-shirt "britney"... qui sera conservé par la suite en guise de récompense, et cette symbiose entre les musiciens et le public incitera même le plus grand des deux guitaristes-chanteurs (la batteuse donne elle aussi de la voix) à se laisser emporter par un mini-stage diving (on rappelle que le plafond est très bas, ici...). Évidemment, le son est moins propre qu'au Trabendo, et là encore cela ne semble pas déplaire au groupe, qui n'hésitera pas à imposer un petit rappel en fin de set, emporté qu'il est par l'enthousiasme général et désireux de laisser son empreinte ici, comme pas mal de groupes australiens l'ont fait précédemment. D'ailleurs, à la question "comment se fait-il qu'il y ait autant de bons groupes de punk et garage australiens depuis 4 ou 5 ans ?", le même chanteur-guitariste aventureux répondra en riant que c'est "parce que nous sommes isolés, loin du reste du monde", ce qui n'est pas forcément limpide mais est une piste à explorer... Dans tous les cas, on ne regrette pas le déplacement, cette cinquantaine de minutes était aussi énergique qu'attendue, le groupe est bienveillant, disponible, rigolo, espérons qu'il réussisse à faire son trou (mais pas trop vite, histoire de continuer à en profiter dans des salles à taille humaine) et qu'on le revoie aussi fringant dans les mois à venir !

La suite, ce sera très probablement ce samedi, au Supersonic, avec Screaming Females et Rawdog.