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l'ayatollah du rock
29 mai 2012

[Shellac] kill him

Date : 29 mai 2012

 

Mardi soir, les températures toujours caniculaires peuvent expliquer le retard à l’allumage pris par les spectateurs du Bataclan : à 19h30, il n’y a pas plus de 22 personnes présentes (à ce niveau, le compte est précis !), et à 20h00 on n’a toujours pas atteint la centaine… Ce côté famélique sera progressivement gommé, la musique attirant le public à l’intérieur, mais on n’atteindra qu’une petite cuvée, l’étage est fermé, et on ne se marchera pas sur les pieds dans la fosse, sauf délibérément bien sûr…

 

Autant dire qu’on ne peut pas se cacher lorsqu’arrive sur scène Helen Money, seule avec son violoncelle, qui en une petite quarantaine de minutes va nous montrer qu’il n’est pas forcément besoin d’être nombreux pour faire du bruit. A partir de boucles et de pédales d’effets dignes de celles généralement attribuées aux guitaristes, la donzelle, assez peu causante sans pour autant tomber dans l’autisme, va nous proposer des titres totalement instrumentaux dont on peut dire qu’ils débouchent les esgourdes ! Si parfois on discerne un son de boîte à rythmes ou une bande, l’essentiel de ce que l’on perçoit est joué devant nous, et bien joué d’ailleurs, avec ou sans archet, en maintenant le violoncelle debout ou en le tordant dans tous les sens à la recherche du larsen égaré, et la définition “Expérimental / Métal / Rockest assez bienvenue sur ce coup-là… Dans les meilleurs moments, on oscillerait presque entre Wire et Fields of the Nephilim, un grand écart pas si incongru que cela puisque le set est d’une grande cohérence. Bien sûr, on peut se dire que l’exercice est parfois un peu vain, mais comme il est excitant la plupart du temps on accepte les quelques longueurs, comme on accepte les difficiles transitions : le silence pendant 10 secondes permet aux impénitents bavards du lieu de reprendre leurs habitudes d’empêcheurs d’écouter en rond, mais cela ne dure jamais très longtemps, heureusement. Car on a vraiment la sensation d’entendre des guitares saturées, l’effet est impressionnant, et puisque les références de la demoiselle sont plutôt pointues et de bon goût (la reprise d’un titre des Minutemen, political song for michael jackson to sing, n’en est qu’une preuve supplémentaire), cela nous donne une première partie réussie, étonnante, qui permet de se préparer parfaitement à ce qui nous attend une vingtaine de minutes plus tard…

 

Car si la mise en route du set est un poil longuette, ce qui nous laisse le temps d’admirer le batteur au plein centre, entouré de son guitariste et de son bassiste, la déflagration sonore que constitue le début du premier titre est d’une violence à faire pleurer de plaisir un sado-masochiste acouphénique : le batteur martèle ses fûts et ses cymbales comme un damné, le bassiste a visiblement réglé les potards au maximum légal en France, tandis que le guitariste est un expert dans ce genre de brutalités… Shellac est le groupe de Steve Albini, ingénieur du son/producteur pour le moins réputé (la liste de ses contributions inclut tant Nirvana que les Breeders, Jon Spencer ou encore Mono), qui en profite pour se lâcher dans un genre de post-rock apocalyptique, mâtiné d’influences largement audibles comme NoMeansNo, même si on retrouve moins la folie jazzyque des Canadiens. En revanche, on retrouve très nettement du suc des Melvins, des cousins assumés, et ceci explique sans doute que cinq ans plus tard (à trois jours près...), on retrouve dans le même lieu le même enthousiasme qui nous avait transporté alors... Les morceaux sont rapides, ou au contraire prennent le temps de pousser l’expérimentation à son paroxysme, et le rôle du batteur aux faux airs de Peter Murphy est essentiel : derrière une allure de brute (peu, au demeurant) épaisse, on constate un savoir-faire remarquable, la capacité de gérer des morceaux aux structures improbables (un temps de plus ou de moins au fil du morceau, ce n’est pas si évident, non ?), et son sens du spectacle de façon plus générale expliquent pourquoi il a droit à la place centrale sur scène... Mais n’allez pas croire que ses deux acolytes se tournent les pouces : le partage du chant est une chose, plutôt réussie d’ailleurs, dans la mesure où le chant n’est pas la partie la plus travaillée, et la gestion des instruments respectifs en est une autre, que chacun mène à bien de manière idéale, Albini accrochant au passage sa guitare au niveau de la ceinture et non en bandoulière, ce qui doit lui laisser plus de latence dans son utilisation. Le bassiste est également chargé de gérer les temps morts créés par le réaccordage de la guitare, il en profite pour procéder à un échange de questions-réponses “uniquement en anglais” avec le public, on est souvent proche du non-sense, c’est à la fois hilarant et totalement incongru, voire débile, et si cela s’éternise un peu trop cela constitue une coupure pas désagréable dans le set. On pourrait croire que le set est parsemé de soli divers et avariés, ce n’est pas le cas, il y a surtout une multiplication de petits détails musicaux qui constituent d’infimes variations créant le plaisir auditif, pour moi comme pour chacun des spectateurs, le public est composé de connaisseurs, qui maîtrisent le répertoire du trio, s’enthousiasmant particulièrement sur the end of radio ou prayer to god, mais ne montrant jamais la moindre baisse d’attention ni de soutien. Il faut dire que le groupe est finalement proche du public, n’hésitant pas à donner des bouteilles d’eau, à donner rendez-vous au stand après le set, et s’il refuse les compromis vis-à-vis du système (pas d’invitations pour les journalistes, pas de pub, par exemple), il donne tout pour ceux qui viennent assister à ses prestations. Celle-ci se termine, après plus de 80 minutes très intenses, par le démontage de la batterie sur le dernier titre (bassiste et guitariste ôtent des éléments au fur et à mesure du morceau, jusqu’à disparition complète de la musique), ce qui au passage empêche tout rappel plus ou moins convenu. Bref, comme attendu, le groupe a tout donné, n’a pas fait semblant, et sa simplicité n’est que la cerise sur le gâteau d’une musique qui, au moins en live, ne peut que susciter une fièvre de bon aloi dans la salle !

 

Samedi, direction Montpellier pour le retour sur scène des Sheriff, entre autres...

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